2-3 : Les règles relatives aux moyens d'existence et de l'acquisition des biens | Islamopédie
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1) Les questions du culte et de dévotion

< 1-1 : La science et ses mérites

< 1-2 : La purification et ses secrets, la prière et tout ce qui s'y rapporte

< 1-3 : La zakât (aumône légale), ses secrets et de tout ce qui s'y rapporte

< 1-4 : Le jeûne, ses secrets, ses aspects importants et de tout ce qui s'y rapporte

< 1-5 : Le pèlerinage, ses secrets, ses mérites, ses règles de convenance

< 1-6 : Les règles de convenance pour aborder le Coran munificent et l'évocation de ses mérites

< 1-7 : Les invocations

2) Les coutumes et les habitudes

< 2-1 : Les règles de bienséances concernant le repas et les réceptions

< 2-2 : Le mariage, ses bonnes règles et ce qui s'y rapporte

< 2-3 : Les règles relatives aux moyens d'existence et de l'acquisition des biens

< 2-4 : Les règles de la compagnie, de la fraternité, de la cohabitation avec les créatures

< 2-5 : Le voyage

< 2-6 : La recommandation du bien et de l'interdiction du mal

3) Ce qui est périlleux

< 3-1 : L'explication des merveilles du coeur

< 3-2 : Les exercices spirituels de l'âme et l'amélioration du caractère

< 3-3 : La réduction des deux appétits

< 3-4 : Les dégâts de la langue

< 3-5 : La désapprobation de la colère, du ressentiment et de l'envie

< 3-6 : La dépréciation des honneurs et de la duplicité et leur remède

< 3-7 : La dépréciation de l'orgueil et de la fatuité

< 3-8 : La vanité, ses formes et ses degrés

4) Ce qui sauve

< 4-1 : La repentance, ses conditions, ses principes de base et tout ce qui s’y rapporte

< 4-2 : La patience est de l’action de grâce

< 4-3 : L’espérance et la crainte

< 4-4 : L’ascètisme et la pauvreté

< 4-5 : Le Tawhid, le Tawakkoul et sa vertu

< 4-6 : L’amour, le désir ardent, la familiarité et le contentement

< 4-7 : L’évocation de la tombe
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2-3 : Les règles relatives aux moyens d'existence et de l'acquisition des biens
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Sache que par la bienveillance de Sa sagesse (bi-hikmatihi), Allâh - سبحانه وتعالى - a fait du bas monde une demeure pour agir et acquérir (dâr tasbâb wa iktisâb), soit pour vivre, soit pour assurer le retour dans l’autre monde. Nous allons maintenant évoquer les règles en matières de commerce et de travail et la nécessité d’acquérir les moyens d existence.

Le mérite du travail

Allâh - تعالى - a dit : { Nous avons fait du jour le moment de gagner sa vie } [Qur’ân : 78-11].

Allâh - تعالى - évoque cela comme un don gratuit de Sa part. Il a dit également : { Nous vous avons établis sur la terre ; Nous vous y avons donné des moyens pour vivre. Comme vous êtes peu reconnaissants ! } [Qur’ân : 7-10].

Il a institué cela comme un bienfait et a demandé qu’on Lui rende Grâce pour cela. Allâh - تعالى - a dit aussi : { Vous ne faites aucun mal si vous recherchez une faveur de votre Seigneur }. [Qur’ân : 2-198].

De même il est rapporté dans le Hadîth que le Prophète - صلى الله عليه وآله وسلم - a dit : « La recherche des acquisitions licites est un combat pour Allâh (Jihâd) », « Allâh aime le serviteur qui a un métier ». Il est rapporté aussi chez Al-Bukhârî que le Prophète - صلى الله عليه وآله وسلم - a dit « Aucun homme n’a jamais consommé de meilleurs nourritures que celles acquises grâce à son propre effort. Ainsi le Prophète d’Allâh Dâwûd (David) - عليه السّلام - mangeait de l’effort de ses propres mains ».

Il est dit dans un autre Hadîth « Zakarya (Zacharie) - عليه السّلام - était menuisier ».  

De même Ibn ‘Abbâs disait ceci : « Adam - عليه السّلام - était laboureur, Nûh (Noé) menuisier, Idrîs (Enoch) tailleur, Ibrâhîm (Abraham) et Lût (Loth) cultivateur Sâlah commerçant, Dâwûd (David) fabricant de cottes de mailles, Mûssâ (Moïse), Shu’ayb - عليهم السّلام - et Muhammad - صلى الله عليه و سلم - étaient bergers ».

S’agissant des traditions (al-âthar), on rapporte que Luqmân, le sage, a dit à son fils : « Ô mon fils ! Aide-toi de l’acquisition des gains licites car personne ne s’est appauvri sans subir trois aléas : une fragilité dans sa foi, une faiblesse dans son esprit et une disparition de la grandeur de son âme. Mais le pire de ces aléas c’est le mépris des gens à son égard ».

On a demandé également à Ahmad Ibn Hanbal : « Que dis-tu d’un homme qui reste assis dans sa maison ou dan la mosquée, et qui dit : je ne ferai rien tant que je ne reçois pas mes subsistances ? » Ahmad répondit : « C’est un homme qui ignore tout de la science. N’a-t-il pas entendu la parole du Prophète - صلى الله عليه وآله وسلم - : « Allah a placé mes subsistances à l’ombre de ma lance », ou celle où il évoque les oiseaux : « Ils partent le ventre vide et rentrent le gosier plein » .

Il faut dire que les Compagnons de l’Envoyé d’Allâh - صلى الله عليه وآله وسلم - pratiquaient le commerce sur terre et en mer et travaillaient leurs champs. Or ils constituent un modèle de conduite auquel on est tenu de se conformer.

Abû Sulaymân ad-Dârânî disait : « Pour nous la dévotion ne consiste pas à te clouer au sol pendant qu’autrui se démène et s’épuise pour toi. Mais commence toi-même par gagner ton pain, ensuite abonne-toi à l’adoration ».

Si l’on rétorque qu’Abû ad-Dardâ avait dit : « J’ai pratiqué le commerce et la dévotion mais je n’ai pas pu les concilier, aussi ai-je opté pour la dévotion » ;

on répondra par ceci : Le commerce n’est pas recherché en lui-même. Il est recherché pour ne pas dépendre des gens, pour assurer la famille contre la dépendance financière et pour combler de faveur les frères…

En revanche, si le but recherché consiste à amasser l’argent et à s’en glorifier, cela devient blâmable et méprisable.

Aussi, il convient que le contrat de vente qui assure les gains soit fondé sur quatre éléments principaux : la validité (as-sihhat), l’équité (al-'adl), la bonté (al-ihsân) et la crainte à l’égard de sa foi (ash-shafaqat 'ala d-dîn).

Le premier élément : sur sa validité (as-sihhat) :

s’il s’agit d’un contrat de vente, il comporte trois piliers (arkân) :

- la perte contractante,

- l’objet du contrat

- et la formulation de la conclusion du contrat.

Le premier pilier (ar-rukn al-awwal) : Pour ce qui est de la partie contractante (al-'âqib), le commerçant se doit de ne pas traiter avec un dément, parce qu’il est frappé par l’incapacité juridique. Autrement dit, il ne peut pas conclure une vente. De même il ne peut pas traiter un enfant mineur sauf autorisation de la part de son père ou de son tuteur. D’ailleurs pour l’Imâm Ash-Shafi’î, les contrats conclus par un enfant mineur sont nuls. Mais selon nous, traiter avec un aveugle reste juridiquement valable parce que ses opérations d’achat et de vente ne sont pas frappées de nullité comme le stipule Ash-Shafi’î. Quant aux hommes injustes et ceux dont la plupart des biens sont d’origine illicite, il ne convient pas de traiter avec eux, sauf là où on est sur que leurs biens, objets de tractations, sont d’origine licite.

Le deuxième pilier (ar-rukn ath-thânî) : Pour ce qui est de l’objet du contrat (al-ma'qûq 'alayh), c’est-à-dire le bien échangé, il convient de savoir qu’il n’est pas permis par exemple de vendre un chien parce qu’il est souillé, contrairement au mulet et à l’âne qui peuvent être vendus, peu importe que nous disions qu’ils sont purs ou souillés. De même il n’est pas permis de vendre les insectes ou des formes sculptées. Il n’est pas permis non plus de vendre ce qu’on ne peut remettre matériellement, comme l’oiseau en l’air, ou légalement comme les bien hypothéqués.

Le troisième pilier (ar-rukn ath-thâlith): S’agissant de la formulation de la conclusion du contrat (al-lafdh), elle se réalise par la confirmation (al-îjâb) et l’acceptation (al-qubûl). Toutefois si l’acceptation précède la confirmation, le contrat est valable selon une version, et ne l’est pas selon une autre. De même si la vente s’effectue sous forme d’un troc, elle reste valable selon la position de l’Imâm Ahmad.

Mais selon Al-Qâdhî Abû Ya’lâ ceci n’est valable que pour les marchandises en petite quantité. Et c’est la position la mieux fondée, à savoir que le troc doit porter sur les objets précieux en raison de la pratique coutumière en ce domaine. Du reste, le scrupule implique qu’on ne doit pas renoncer aux procédés de confirmation et d’agrément pour éviter les aléas de la divergence et des désaccords. D’autant plus qu’Allâh - تعالى - insiste beaucoup dans Sa mise en garde dans l’affaire de l’usure. Aussi le fidèle se doit de prendre garde à ne pas y succomber. En effet l’usure (ar-ribâ) est de deux sortes : l’usure par le surplus et l’usure par délai. Il convient qu’il sache cela ainsi que tout ce qui s’y rapporte. De même, il doit connaître également les conditions du paiement anticipé, du bail, de la spéculation et de l’association, car les profits et les gains sont intimement liés à ce genre de contrats.

Le deuxième élément, c’est l’équité et le fait d’éviter l’injustice dans le traitement.

Nous entendons par injustice tout ce qui nuit à autrui. A son tour le dommage causé est de deux sortes :

- général

- et particulier.

Le premier prend la forme du monopole qui est interdit en raison de ce qu'il recèle comme hausse des prix et gêne sérieuse sur le plan alimentaire pour les gens. Il faut savoir que le monopole consiste en ceci : On pratique l'achat en grandes quantités de produits agricoles dans les moments de hausse de prix sur le marché puis on les stock en attendant que leurs prix grimpent sur le marché. En revanche si le vendeur stock des produits alimentaires qui proviennent de ses champs, il ne pratique pas le monopole. Il en va de même lorsque les opérations d'achat et d'acquisition des produits se font pendant une période de surabondance et de baisse des prix, de telle manière que cela ne provoque aucune gêne pour les gens. Mais en général il est répréhensible de pratiquer le monopole des produits alimentaires dans le commerce parce qu'ils sont indispensables pour les humains.

Le deuxième se rapporte au dommage particulier, lorsque le vendeur vente sa marchandise des qualités qu'elle ne possède pas ou qu'il cache certains de ses défauts car il porte préjudice à l'acheteur. D'autant plus que le Prophète - صلى الله عليه وآله وسلم - a dit : « Celui qui fraude et nous trompe ne fait pas partie de notre groupe ».

Sache également que la fraude est interdite dans les ventes et fabrication des objets. Ainsi on a interrogé l'Imâm Ahmad sur le raccommodage des tissus qui deviennent comme neufs et il a répondu : Il n'est pas permis à celui qui les vend de cacher les reprises. De même le commerçant est tenu d'effectuer de bonnes pesées et il n'y parviendra convenablement que s'il fait pencher la balance en faveur de l'acheteur lorsqu'il vend un produit et en faveur du vendeur lorsqu'il est lui-même l'acheteur. Lorsque le marchand de fourrage mêle du sable à son produit, il est considéré comme tricheur. Il en va de même du boucher lorsqu'il mêle des os qu'on ajoute habituellement. Il est interdit de pratiquer an-Najash qui est un procédé consistant à augmenter le prix d'une marchandise dont on ne veut pas pour désappointer l'acheteur. Enfin il est interdit de trafiquer les produits.

Le troisième élément porte sur la bonté dans le traitement (ihsân al-mu'âmalat) car Allah - تعالى - a recommandé l'équité (al-'adl) et la bonté (al-ihsân).

Ainsi la bonté consiste à être tolérant dans la vente et à ne pas léser le partenaire en matière de profit au-delà de ce que l'habitude permet, car par principe la lésion est autorisée parce que le profit constitue la finalité de la vente. Mais il convient d'éviter l'excès.

Et lorsque l'acheteur désire offrir un plus par rapport au profit habituel, en raison de son envie pressante et de son besoin, le vendeur est tenu de chercher à refuser l'acceptation d'une telle offre car cette attitude relève de la bonté et de l'excellence. Il en va de même lorsque le partenaire désire régler un prix ou une dette, la bonté consiste soit à être tolérant avec lui, soit à éponger une partie de ce qui est dû, soit à lui accorder un délai, soit à lui accorder des facilités de paiement. La bonté consiste aussi à accepter l'annulation d'une tractation lorsqu'on la lui demande car seul la demande celui qui est lésé par une opération de vente.

Du reste, il existe des Ahadîth qui attestent le bien fondé de cette pratique et promettent de belles récompenses pour celui qui œuvre en ce sens.

Le quatrième élément porte sur la compassion et la crainte du commerçant pour sa foi en ce qui concerne sa vie ici-bas et sa vie future.

En effet, il ne faut pas que son gagne-pain détourne le commerçant de son retour dans l'autre monde car il doit surtout considérer sa foi. Or, cette crainte pour sa foi se réalise en considérant six choses.

- La première : la bonne intention dans le commerce.

Par son activité commerciale, il doit chercher à se passer de toute demande et dépendance envers autrui, cesser d'observer les autres, s'employer à assurer les besoins de sa famille pour faire partie de ceux qui combattent sur le chemin d'Allah et qui prodiguent des conseils utiles pour les musulmans.

- La deuxième chose : il doit avoir le dessein de s'acquitter à travers son commerce ou son métier de l'une des obligations communautaires, car si on délaisse les activités commerciales et artisanales toute la vie risque de s'arrêter complètement.

Néanmoins, il y a dans l'activité artisanale et industrielle des branches importantes et des branches dont on peut se passer en ce sens qu'elles relèvent de l'ornementation, du raffinement, de l'aisance.

Aussi, le fidèle est tenu de s'occuper des métiers importants afin qu'il assume pour les musulmans une tâche utile et suffisamment importante. Ainsi, il convient qu'il évite des métiers comme la joaillerie, la sculpture, la construction à base de plâtre et tout ce qui relève des arts décoratifs, la confection des tissus de soie pour les hommes, la boucherie parce qu'elle implique la dureté du cœur, la coiffure, la tannerie et le nettoyage en raison du contact direct avec les souillures et les saletés.

Il n'est pas permis de recevoir une rémunération en échange de l'enseignement du Qur'ân, des actes cultuels et obligations à caractère communautaire.

- Le troisième chose : le marché du bas-monde ne doit pas l'empêcher d'accéder au marché de la vie future qui est représenté sur terre par les mosquées.

Il convient donc que le fidèle consacre le début de la journée jusqu'au moment de l'entrée au marché à la vie future en observant régulièrement ses awrâd habituels. En effet, les commerçants vertueux parmi les anciens pieux consacraient le début et la fin de la journée à la vie future et la mi-journée à l'activité commerciale.

De même que lorsque le fidèle entend les appels à la prière de Dhuhr et de 'Asr, il doit cesser de travailler pour s'acquitter ses obligations rituelles.

- La quatrième chose : il convient pour le fidèle de s'attacher régulièrement à la mention d'Allah - تعالى - dans le marché, et à la pratique de la glorification et de l'affirmation de l'unicité d'Allah.

- La cinquième chose : il convient qu'il ne s'attache pas trop au marché et au commerce et qu'il ne soit pas le premier à entrer au marché et le dernier à en sortir.

- La sixième chose : il ne doit pas se contenter d'éviter ce qui est illicite mais s'employer à se prémunir contre les situations douteuses. De même qu'il ne doit pas se fier aux fatwâ mais consulter son cœur chaque fois qu'il hésite.

L'explication du licite et de l'illicite

Sache que la recherche du licite est une obligation pour chaque musulman. Or beaucoup d'ignorants prétendent qu'il n'y a plus de licite et disent qu'il n'en reste que l'eau douce et les herbes et que tout le reste est infecté par la corruption qui a gagné les affaires et les rapports dans leur traitement. Lorsqu'ils ont eu cela et su qu'il leur faut se nourrir, ils furent peu regardant en matière d'acquisitions suspectes et illicites. Il s'agit pourtant d'une attitude qui relève de l'ignorance et du manque de savoir car il est rapporté dans les deux Recueils authentiques, d'après le Hadîth transmis par al-Nu'mân ibn Bashîr, que le Prophète - صلى الله عليه و سلم - a dit : « Le licite est évident et l'illicite est évident, et il y a entre eux, des choses douteuses et confuses ».

Comme cette prétention de la part de ces ignorants devint une innovation blâmable dont le dommage s'était généralisé et dont les étincelles ont rejailli sur la foi, il faut mettre un terme à sa malfaisance en éclairant le lecteur sur la différence concevable entre le licite, l'illicite et ce qui est douteux et suspect.

Nous allons expliquer cela en trois points

Le premier point c'est la vertu de rechercher le licite, la dépréciation de l'illicite et les degrés du licite et de l'illicite. Allah - qu'il soit exalt — a dit : « Ô vous, les Prophètes ! Mangez d'excellentes nourritures Faites le bien ! » [Coran : XXIII-51].

Or les excellentes nourriture constituent le domaine du licite. Allah a recommandé cela avai l'action. Pour ce qui est de la dépréciation de l'illicite, Dieu - qu'il so exalté - a dit : « Ne dévorez pas à tort vos biens entre vous ». (Coran 11-188). Il existe, d'ailleurs, de nombreux versets en ce sens.

De même Abû Hurayra rapporte que l'Envoyé d'Allah - صلى الله عليه و سلم - a dit : « Ô vous les hommes ! Allah est bon et n'accepte que ce qui est bon » ensuite il a « évoqué le cas de l'homme qui rentre d'un long voyage hirsute et poussiéreux et qui lève ses bras au ciel en disant : Seigneur, Seigneur ! Pourtant sa nourriture est d'origine illicite, sa boisson est d'origine illicite, ses habits sont d'origine illicite et il est alimenté par ce qui est illicite. Comment peut-on l'exaucer ? » [Hadîth recensé par Muslim et on a rapporté bien d'autres hadîth en ce sens.]

On a rapporté également que Sa'd a demandé à l'Envoyé d'Allah - صلى الله عليه و سلم - : « Comment faire pour que son invocation soit exaucée », il lui a répondu par ceci : « Fais en sorte que ta nourriture soit bonne quant à son acquisition et ton invocation sera exaucée ».

Il faut dire que les anciens pieux se penchaient longuement sur le licite et l'examinaient avec beaucoup d'attention. Ainsi, on rapporte qu'Abû Bakr as-Siddîq a mangé quelque chose de suspect quant à son caractère licite puis il l'a vomi.

Les degrés du scrupule : le scrupule comporte quatre degrés

Le premier degré c'est de se détourner de tout ce dont la fatwâ implique l'interdiction. Ceci n'a pas besoin d'exemple pour l'illustrer.

Le deuxième degré : c'est d'avoir du scrupule par rapport à toute question douteuse qui n'implique pas l'obligation mais seulement la recommandation de l'éviter, comme on le verra en traitant des questions douteuses. Ceci relève d'ailleurs de la Parole du Prophète -sws- : « Laisse ce qui te trouble pour ce qui ne te trouble pas ».

Le troisième degré : le scrupule par rapport à certain licite pour ne pas succomber dans ce qui est illicite.

Le quatrième degré : le scrupule par rapport à tout ce qui n'est pas voué à Allah - qu'il soit exalté - et c'est le scrupule des justes. Comme exemple qui l'illustre, nous mentionnons l'attitude de Yahyâ ibn Yahyâ al-Nisâbûrî : On rapporte qu'un jour il a pris un médicament. Sa femme lui dit : si tu marchais un peu dans la maison, pour que le remède ait son effet. Il lui dit : c'est une marche que je ne connais pas. moi qui exige des comptes à mon âme depuis trente ans. Voilà un homme qui n'a été saisi, à propos de cette marche, par aucune intention relative à la foi. Voilà pourquoi il ne l'a pas entreprise. Cet exemple relève d'ailleurs des subtilités du scrupule. Ce qu'on peut en dire de sûr, c'est que le scrupule comporte un début et une fin, et entre eux il y a des degrés en matière de précaution et de prévoyance. C'est que plus l'homme est scrupuleux, plus il aura une charge légère et une traversée rapide au-dessus du Sirat. Du reste les stations dans la vie future diffèrent en fonction de la variation des degrés en matière de scrupule. Au même titre que les bas degrés de l'Enfer différent à l'encontre des injustes en fonction des degrés de l'illicite. Voilà pourquoi, si tu veux, tu peux redoubler de précautions et si tu veux, tu peux te permettre des dispenses. C'est pour ton âme que tu uses de prévoyance et c'est à ses dépens que tu t'offres des dispenses.

Le deuxième point : il porte sur les degrés de ce qui est douteux et sa distinction par rapport au licite et à l'illicite. Du reste, le Hadîth rapporté par an-Nu'man ibn Bashir évoque ces trois parties, à savoir le licite, l'illicite et ce qui se trouve entre eux. Ce qui pose problème c'est ce qui est au milieu et que beaucoup de gens ignore, à savoir ce qui est douteux.

Nous allons en dévoiler le sens en disant ceci :

Le licite absolu, c'est ce qui ne comporte dans son essence aucune qualité qui implique l'interdiction de sa réalité concrète, et qui ne comporte pas, dans les causes qui le régissent, une interdiction ou une réprobation.

Citons comme exemple l'eau de pluie que l'homme récupère avant qu'elle ne devienne la propriété de quelqu'un.

Quant à l'illicite, c'est ce qui renferme une qualité interdite, comme l'effet enivrant dans le vin, la souillure dans l'urine ou qui se réalise par le biais d'une cause interdite, comme ce qui se réalise grâce à l'injustice et à l'usure. Ces deux cas extrêmes sont évidents et on y ajoute ce qui se réalise effectivement mais qui peut éventuellement changer de main sans que cette éventualité ait une cause évidente qui le prouve et l'atteste. En effet, les prises et les proies de la mer et de la terre sont licites, sauf qu'il se peut pour celui qui attrape une gazelle ou un poisson, que ces proies aient été prises par un autre chasseur avant de s'en échapper. Evidemment, une telle éventualité ne peut s'appliquer à l'eau de pluie qu'on récupère du ciel. Néanmoins, s'en tenir à ce genre d'éventualité, relève du scrupule des obsédés car il s'agit d'une illusion qui n'a aucun fondement. Mais à supposer qu'il existe une preuve pour l'attester, comme par exemple lorsqu'on découvre chez la gazelle attrapée une blessure dont on ne connaît pas l'origine avec exactitude, cela relèverait de la question du simple scrupule : Cela dit, la définition de ce qui est douteux est la suivante : c'est ce qui génère deux croyances contradictoires issues de deux choses qui impliquent deux croyances différentes.

Il existe, d'ailleurs, beaucoup d'exemples pour l'illustrer. Mais ce qui importe le plus ce sont les deux exemples suivants :

Premier exemple : il s'agit du doute portant sur la cause qui rend la chose licite ou illicite. Ceci se subdivise en quatre cas d'espèce :

Premier cas : c'est lorsqu'on sait, auparavant, que la chose est licite mais qu'ensuite intervient un doute sur la cause de sa licite. Il s'agit là de quelque chose de douteux qu'il faut éviter et dont il est interdit d'en user, comme lorsqu'on voit une proie blessée et qu'on la retrouve morte après être tombée dans l'eau : on ne sait pas exactement si elle est morte par noyade ou à la suite de sa blessure. Il s'agit là de quelque chose d'illicite parce qu'elle est régie par le principe de l'interdiction.

Deuxième cas : c'est lorsqu'on connaît ce qui est licite et qu'on doute sur ce qui est interdit. Le principe qui le régit c'est la licitée, comme lorsqu'on un oiseau vole dans les airs et qu'un homme dise si c'est un corbeau ma femme sera répudiée, et qu'un autre dise : si ce n'est pas un corbeau ma femme sera répudiée, et qu'ensuite l'affaire devient confuse entre eux. Nous ne devons pas stipuler l'interdiction pour l'un des deux hommes. Mais le scrupule implique de les éviter et de confirmer la répudiation pour les deux.

Troisième cas : c'est lorsqu'il y a, à l'origine, interdiction, mais qu'ensuite intervient ce qui implique la licite sur la base d'une croyance plus plausible, bien qu'il y a encore du doute. Son caractère licite est plus plausible, comme lorsqu'on lance une flèche contre une proie qui fuit et qu'on la retrouve ensuite morte sans avoir la moindre blessure, à part celle de la flèche. Manifestement, il s'agit de quelque chose de licite parce que l'éventualité verse dans l'obsession lorsqu'elle ne se fonde pas sur une preuve tangible. En revanche lorsque la proie porte les traces d'un choc ou d'une autre blessure, elle relève du premier cas d'espèce.

Quatrième cas : c'est lorsque l'objet licite est connu mais que prévaut la croyance de l'intervention de l'interdiction pour une raison évidente quant à la prédominance de la présomption légale, comme lorsque l'effort accomplit par le fidèle le conduit à estimer que l'un des deux récipients est souillé en se fondant sur un signe particulier qui implique cette croyance. Celle-ci implique l'interdiction d'y boire et celle de l'utiliser pour les ablutions mineures.

Deuxième exemple : c'est lorsqu'une bête morte de mort naturelle s'est mêlée à une autre qui a été immolée, ou à une dizaine, ou à un nombre déterminé, ou lorsque la sœur de quelqu'un ressemble à une étrangère. Il s'agit là d'un cas douteux qu'il convient d'éviter. C'est le cas aussi lorsqu'un illicite déterminé se mêle à un licite indéterminé, comme lorsque sa sœur ou une dizaine de femmes qui ont tété le même sein dans leur enfance ressemblent aux femmes d'une grande ville, ceci n'implique pas d'éviter de se marier avec les gens de cette ville, car il est permis à celui qui est concerné d'épouser la femme qu'il désire parmi elles parce que leur interdiction constitue une grande gêne. Il en va de même pour celui qui sait qu'il y a certainement de l'illicite qui s'est mêlé à l'argent qui circule. Il n'est pas tenu de renoncer à l'achat et à la consommation car cela comporte beaucoup de gêne pour lui. En effet l'Envoyé d'Allah - صلى الله عليه و سلم - et Ses compagnons savaient qu'il y avait parmi les gens de leur époque des usuriers, pourtant ils n'ont pas renoncé complètement à l'usage de la monnaie ; de même ils ont su qu'une récolte été volée mais ils n'ont pas renoncé à l'achat des récoltes. C'est dire qu'éviter ce genre de chose relève plutôt du scrupule obsessionnel.

C'est le cas également lorsqu'un illicite indéterminé se mêle à un licite indéterminé comme le cas de l'argent qui circule à notre époque. En effet, ce mélange n'interdit pas d'acquérir quelque chose de particulier, sauf s'il porte un signe particulier qui prouve que c'est un bien illicite comme lorsqu'on le reçoit de la main d'un gouvernant injuste. S'il ne porte pas de signe particulier, son abandon relève du scrupule sans qu'il y ait interdiction. Ceci parce qu'on savait à l'époque de l'Envoyé d'Allah - صلى الله عليه و سلم - et des Califes après lui, que le prix des vins, l'argent de l'usure et les produits du butin se sont mêlés à la masse de l'argent en circulation. Certains compagnons ont été témoins du pillage de Médine et des forfaits des tyrans mais ils n'ont pas interdit l'achat au marché. C'est dire que, sans la validité de ce principe, tous les agissements deviendraient impossibles en raison de la prédominance de la perversion chez les gens. Il reste que le principe qui régit l'argent c'est la licité.

Ainsi, lorsqu'il y a contradiction entre le principe et ce qui prédomine sans que ce dernier porte un signe particulier, c'est la licité qui prévaut comme nous l'avons souligné à propos de la terre des rues et des récipients des polythéistes. En effet, 'Umar - رضي الله عنه - avait bu dans une jarre appartenant à des chrétiens, bien qu'ils boivent du vin et mangent du cochon, et qu'ils ne s'embarrassent pas des souillures. Par ailleurs, les compagnons avaient pour habitude de porter des manteaux de cuir tanné et des vêtements teintés. D'ailleurs, celui qui réfléchit sur la situation des tanneurs et des teinturiers saura qu'ils sont submergés par les souillures, ce qui montre qu'ils ne se prémunissent que contre une souillure visible ou portant un signe, car ils ne prennent pas en considération les suppositions gratuites qu'impliqué le cours normal des choses.

Si l'on se demande : ils prennent des libertés dans les questions de purification mais ils se prémunissent contre les cas douteux en matière d'illicite, où est donc la différence ?

Nous répondons par ceci : si tu veux entendre par là qu'ils prient avec les souillures, ceci n'est pas vrai et si tu veux entendre qu'ils se prémunissent contre toute souillure qu'il faut éviter, ceci est vrai. Quant à leur scrupule par rapport aux cas douteux, il s'effectuait par le biais du renoncement de l'âme à ce qui n'implique pas le mal par crainte de ce qui fait mal - du les gens scrupuleux parmi les anciens fuyaient les biens licites qui pouvaient absorber leurs cœurs. Allah est Plus Savant.

Le troisième point porte sur le licite, l'illicite, la recherche, l'interrogation, la négligence.

Sache que si on t'offre une nourriture ou un cadeau ou si tu veux acheter quelque chose d'une personne, tu n'as pas à te poser des questions du genre : ceci fait partie des choses dont je n'ai pas la certitude qu'elles soient licites donc je veux bien vérifier son origine, mais tu n'as pas non plus le droit d'abandonner totalement toute vérification et toute recherche à ce sujet. C'est que parfois l'interrogation est obligatoire, parfois elle est interdite, parfois elle est recommandée et parfois elle est répréhensible.

Le mieux qu'on puisse dire à ce sujet est ceci : Le doute est à l'origine de l'interrogation. Il intervient soit à propos d'une question relative à l'argent ou à son propriétaire, soit à propos de quelque chose se rapportant à ce dernier, comme lorsqu'il est inconnu, sans que cela porte un indice qui prouve son injustice, comme la tenue des soldats, ou sa rectitude comme les habits des savants et des ascètes. Ici, l'interrogation ne s'impose pas et elles n'est pas permise car une telle attitude recèle une atteinte et une gêne pour le musulman et on ne peut en dire de lui : ceci est douteux, parce que le doute implique un soupçon fondé sur une preuve ou une indication. Voilà pourquoi il est permis de traiter avec un tel homme, parce que le fait d'avoir les biens dans ses mains prouve qu'il est le propriétaire, tandis que les autres preuves contre lui restent fragiles. Néanmoins le renoncement dans ce cas relèverait du scrupule.

Pour ce qui se rapporte aux biens, c'est lorsque le licite se mêle à l'illicite, comme lorsqu'on propose au marché des quantités de nourriture spoliée que les gens habitués au souk achètent. En effet, celui qui effectue des achats dans un tel marché n'est pas tenu de poser des questions sur la marchandise proposée sauf s'il s'avère que la plupart de la marchandise proposée est illicite. Dans ce cas, il doit poser des questions. Autrement, si la plus grande partie de ce qui est proposé n'est pas illicite, l'interrogation relèverait du scrupule et elle ne serait pas obligatoire.

Nous disons la même chose à propos d'un homme dont les biens licites se sont mêlés à d'autres illicites, comme lorsqu'il s'agit d'un commerçant qui effectue des opérations saines tout en recourant à la pratique de l'usure. Lorsque la grande partie des biens d'un tel commerçant est illicite on ne doit accepter son invitation et ses cadeaux qu'après avoir inspecté leur origine. S'il s'avère que ce qu'on prend est d'origine légitime, il est alors permis de l'acquérir, autrement il convient d'y renoncer. Si les biens proposés sont illicites dans une petite proportion, ce qu'on prend devient douteux et le scrupule implique qu'on doit y renoncer.

Sache également que l'interrogation s'impose en raison de la suspicion et ne s'arrête que lorsqu'il n'y a pas de suspicion qui l'implique. Ceci lorsque le responsable n'est pas accusé. S'il est accusé et lorsque tu sais qu'il a un dessein à travers ta présence ou l'acceptation de son cadeau, tu ne dois pas avoir confiance dans son dire et il convient d'interroger quelqu'un d'autre.

Le quatrième point : sur Le licite, l'illicite et la modalité pour le repentant de réparer les forfaits financiers.

Sache que celui qui se repent et qui possède des biens mélangés doit extraire ce qui en est illicite et s'en débarrasser. S'il s'agit de biens matériels connus, leur affaire est facile. S'il s'agit de biens confus et mélangés mais déterminés comme les grains, les pièces de monnaie, dont on connaît la valeur, on doit trier celle-ci. S'il y a difficultés on a deux possibilités pour s'en sortir.

- L'une d'elle consiste à s'en tenir à la croyance générale.

- L'autre consiste à s'en tenir à la certitude.

En somme, c'est l'attitude qu'exigé le scrupule.

Lorsqu'on doit se débarrasser des biens illicites et s'ils ont un propriétaire déterminé, il convient de les lui remettre à lui ou à ses héritiers. Même si ces biens ont rapporté des intérêts et ont augmenté on doit tout réunir pour le lui remettre. Si on désespère de retrouver le propriétaire et on ne sait pas s'il a ou non laissé des héritiers après sa mort, on doit donner ces biens en aumône. S'il s'agit de biens qui étaient à l'origine consacrés à l'intérêt commun des musulmans, il convient de les investir dans la construction des ponts et des mosquées et dans l'entretien des routes qui conduisent à la Mecque et dans tout ce qui est utile pour les passagers musulmans.

Il reste que si le fidèle a des parents qui possèdent des biens illicites, il doit chercher des échappatoires pour ne pas en consommer, s'il s'agit de biens d'origine douteuse il doit les ménager, s'ils refusent, il doit en prendre une petite quantité. Ainsi on rapporte que Bishr a pris une datte donnée par sa mère puis il est monté dans la pièce et il l'a vomie.

Le cinquième point : la fréquentation des sultans et des gouvernants, sur l'acceptation de leurs cadeaux et ce qui est permis en matière de fréquentation de sultans injustes, etc...

Sache que celui qui reçoit de l'argent offert par un sultan doit chercher l'origine et la provenance de cet argent, se demander s'il le mérite ou non et évaluer la quantité qu'il doit accepter.

En effet, beaucoup parmi les anciens ont eu du scrupule à l'accepter. D'autres l'acceptaient puis le donnaient en aumône.

Pour ce qui est de notre époque, la prudence est de rigueur à ce sujet parce qu'on sait généralement comment on parvient à recevoir un tel argent. En plus, on sait qu'on ne peut l'obtenir qu'en s'humiliant, qu'en le demandant et qu'en fermant les yeux sur certains comportements répréhensibles. Du reste, certains parmi les anciens pieux ne prenaient jamais un tel argent, prétextant qu'il y avait beaucoup de gens parmi eux qui le méritaient et qui ne l'ont pas pris. Evidemment, ce n'était qu'un prétexte car ils ne feraient que prendre leur dû.

La situation de celui qui fréquente les princes et les agents iniques

Sache que tu as à choisir entre trois attitudes dans tes rapports avec les princes et les agents injustes :

- La première consiste à accéder auprès d'eux et c'est la pire des attitudes.

En effet on rapporte que le Prophète - صلى الله عليه وآله وسلم - a dit : « Celui qui fréquente les portes des sultans s'expose à la séduction », « Plus le serviteur se rapproche du sultan, plus il s'éloigne d'Allah ».

De même, Hudhayfa disait : « Prenez garde aux situations porteuses de discorde. » On lui a demandé : « On quoi consistent elles ? » Il a répondu : « Ce sont le seuil des princes. L'un de vous accède auprès du prince, confirme ses dires en mentant et dit sur lui des choses vaines. Un prince a dit à un ascète : veux-tu nous rendre visite ? Il lui dit : Si tu me rapproches, tu m'exposes à la discorde et à la séduction. Si tu me renvoyes tu me prives. Or, tu ne possèdes pas ce que je veux et je ne possède pas ce dont je crains ta main-mise. Celui qui te fréquente ne vient vers toi que pour se passer d'autrui grâce à toi. Or, je me passe de toi grâce à Celui qui t'a rendu indépendant par rapport à moi. »

Ainsi ces traditions indiquent la réprobation de fréquenter les sultans.

Celui qui accède auprès des sultans, s'expose à la tentation de désobéir à Allah - عز وجل -

- soit par ses actes (al-fi'l),

- soit par ses paroles (al-qawl),

- soit par son silence (as-sukût).

S'agissant des actes (al-fi'l), l'accès auprès d'eux s'effectue généralement dans des lieux usurpés. D'ailleurs à supposer qu'il ne s'agit pas d'endroits usurpés, ce qui entoure le sultan et l'abrite, comme les tentes et les meubles est d'origine illicite. Or il est interdit d'en tirer profit.

Du reste, même si l'on suppose que tout ceci est licite, le visiteur risque toujours de saccomber à d'autres interdits comme le fait de se prosterner devant lui, ou de se mettre debout en sa présence, ou de le servir ou de se montrer humble en raison de sa charge qui est l'instrument de sa coercition. Se montrer humble devant un injuste est une désobéissance à Allah. En effet, celui qui se montre humble devant un homme riche, en raison de sa richesse et non pas pour une autre raison, perd les deux tiers de sa foi. Qu'en serait alors s'il se montrait humble devant un homme injuste ? Le fait de lui baiser la main est une marque de désobéissance, sauf si on y est contraint, ou s'il s'agit d'un imâm juste, ou d'un savant qui le mérite. Autrement cela n'est pas permis et il faut se contenter du simple salut.

S'agissant des paroles (al-qawl), cela consiste à faire des invocations en faveur d'un homme injuste, à le vanter, à le confirmer dans ses discours vains et faux soit par des mots, soit en hochant la tête soit en lui montrant un visage joyeux et épanoui ou à lui montrer de l'affection, de l'allégeance ou à s'attacher à sa longue vie. Car en général le visiteur ne se contente pas des salutations mais parle et ne manque pas de dire ce genre de propos. Or, il est dit dans une tradition : « Celui qui invoque la longue vie en faveur d'un homme injuste ne fait que désirer qu'il désobéisse à Allah ». Aussi, il ne lui est permis de dire en guise d'invocations que des formules du genre : Qu'Allah t'améliore ou qu'Allah t'accorde la réussite et ainsi de suite.

Pour ce qui est du silence (as-sukût), il consiste en ceci :

Le visiteur voit, dans les réceptions des princes, des tapis de luxe, des tissus en soie, des couverts en argent, des tenues interdites, en soie, que portent leurs serviteurs, etc... mais il garde le silence. Or, celui qui voit ce genre de choses et garde le silence devient complice.

Il en va de même lorsqu'il entend de leur part des paroles perverses et mensongères, des insultes et des propos gênants, car garder le silence devant ce genre de choses est une attitude illicite parce que le témoin de ce genre de scènes est tenu de recommander le bien et d'interdire le mal.

Si tu dis : Il a l'excuse de garder le silence parce qu'il a peur pour lui-même, nous dirons : certes tu as raison, sauf qu'il n'a nul besoin de s'exposer personnellement pour commettre ce qui n'est permis qu'en vertu d'une excuse. En effet, s'il n'accède pas auprès des sultans et n'assiste pas à ce qu'il voit, il ne sera pas tenu à l'obligation de recommander le bien et d'interdire le mal. C'est dire que celui qui sait qu'il y a de la corruption dans un endroit précis et qui sait qu'il ne pourra pas la faire disparaître s'il y assiste, n'a pas le droit de se retrouver dans ce genre d'endroits.

L'accès auprès des princes injustes en vertu d'une excuse

Si le visiteur parvient à éviter tout ce que nous avons indiqué, ce qui constitue une performance presque impossible, il ne saura se mettre à l'abri d'une corruption qui guette son cœur en voyant le luxe dans lequel ils vivent et en méprisant les bienfaits divins en sa faveur. En plus, il risque de faire de son attitude un modèle auquel d'autres se conformeront, ce qui ne fait que perpétuer la domination des tyrans.

On rapporte que Sa'îd ibn al-Musayyib a été invité à prêter allégeance à al-Walîd et à Sulaymân, les deux fils du calife omeyyade 'Abdu l-Malik. Il a répondu ceci :

- « Je ne prêterai pas allégeance tant que les nuits se succéderont aux jours. »
On lui a dit : « Tu peux entrer par cette porte et sortir par une autre. »
Il a répondu : « Non, par Allah ! Personne ne se conformera à mon attitude ».
Ainsi, pour son refus, on lui a administré cent coups et on lui a fait porter des bures.

Donc, en raison de ce que nous avons indiqué, il n'est permis d'accéder auprès des princes tyrans que si l'on a l'une des deux excuses suivantes.

L'une d'elle est la contrainte de leur part dont on craint les dommages si on s'y oppose.

L'autre est celle d'accéder auprès d'eux pour faire cesser une injustice que subit un musulman. Ceci est permis à condition que celui qui l'effectue ne mente pas, ne vante pas les princes et n'omet pas un conseil s'il pense qu'il sera accepté. Voilà ce qui est exigé pour accéder auprès d'eux.

Dans le cas où c'est le prince qui rend visite au fidèle. Celui-ci est tenu de le saluer. Quant au fait de se lever pour lui et de l'honorer, il n'est pas interdit en échange de l'honneur qu'il fait au fidèle en lui rendant visite. En effet, en honorant la science et la foi, il mérite d'être loué, au même titre qu'en exerçant la tyrannie, il mérite d'être blâmé.

Si le prince entre seul chez le fidèle et que ce dernier estime qu'il convient de se lever pour glorifier la foi, il faut le faire, et s'il entre chez lui avec sa suite, le respect dû aux gouvernants devant les gouvernés s'impose dans ce genre de situation et il est bon de se lever pour lui en ayant cette intention. Néanmoins, si le fidèle sait que cela ne génère pas la corruption chez les gouvernés et qu'il ne risque pas de s'exposer à la colère du prince, il convient de s'abstenir de se lever pour l'honorer. Il doit ensuite le conseiller et lui faire connaître le caractère illicite de sa conduite s'il commet involontairement des actes interdits.

Quant à l'informer de l'interdiction de l'injustice et de la consommation de l'alcool, cela est inutile. Il doit plutôt lui faire craindre la tentation de succomber aux péchés tant qu'il croit que le fait de lui faire peur touche son cœur.

Il doit aussi lui indiquer l'intérêt commun et lui faire connaître les possibilités que permet la loi religieuse pour réaliser ses objectifs dans le cadre de l'exercice de ses fonctions.

Il y a également un troisième cas qui consiste à s'abstenir de fréquenter les princes pour ne plus les voir. Il faut dire que la préservation réside dans cette attitude. Ensuite il convient de croire à la haine qu'il ressent contre eux en raison de leur tyrannie pour ne plus désirer leur rencontre, faire leur éloge, s'enquérir de leur situation, se rapprocher de ceux qui les fréquentent ou regretter ce qu'il rate pour les avoir quittés. Un ancien pieux disait : « Il n'y a qu'un seul jour entre moi et les rois : un jour déjà passé dont ils ne retrouvent plus son plaisir, or nous sommes tous les deux effrayés par ce qui nous attend demain. Donc ce n'est qu'une affaire d'un jour et que peut contenir un jour ? »

Il reste le cas suivant : si le prince t'envoie de l'argent pour le distribuer aux pauvres, et tu sais que cet argent appartient à quelqu'un en particulier, il ne convient pas de l'accepter. Et si cet argent n'appartient pas à quelqu'un de connu il convient de le donner en aumône, comme il a été indiqué et de le distribuer aux pauvres.

Du reste, certains savants ont refusé d'accepter ce genre de dons. Et si la plupart des biens des princes est illicite, il est interdit de traiter avec eux ou de regarder ce qu'ils construisent comme digues, mosquées et canaux d'irrigation : si les matériaux qui ont permis leur édification appartiennent à un particulier, il ne convient de les utiliser qu'en cas de nécessité.

En revanche, si leur propriétaire est un inconnu, il est permis de les utiliser même si le scrupule commande de s'en abstenir.

Allah est Plus Savant.




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